Des chercheurs de l’Université d’Oxford ont comparé la capacité du virus Victoria (issu de la 1ère vague) et du variant anglais B.1.1.7 à interagir avec une batterie d’anticorps, en réalisant des tests de neutralisation in vitro. Dans leur propre stock d’anticorps les plus efficaces qu’ils ont précédemment caractérisés (voir précédent article des mêmes auteurs), 19 ciblent RBD (domaine de liaison avec ACE2) et un cible le domaine N-terminal (NTD), domaine qui n’interagit pas avec ACE2.
L’étude inclut aussi certains anticorps référencés et autorisés en thérapies d’urgences, ainsi que des anticorps issus de 2 essais cliniques (Astrazeneca, Regeneron) et des échantillons sanguins de patients convalescents (dont certains infectés par le B.1.1.7) ou vaccinés (Astrazeneca, Pfizer). Globalement, ces anticorps neutralisants sont très efficaces sur la souche Victoria et moins sur le B.1.1.7, mais de manière hétérogène. Cette réduction d’efficacité est très marquée pour certains anticorps, mais non pour tous.
En utilisant la technique BLI (biolayer interferometry), les chercheurs ont montré que la mutation N501Y (mutation commune aux variants anglais, sud-africain et brésilien) à elle seule augmente de 7 fois l’affinité pour ACE2. Cette augmentation va de pair avec une diminution du pouvoir neutralisant des anticorps. L’anticorps anti-NTD, qui ne cible pas le RBD, réduit de 5,7 fois cette liaison sans que l’on comprenne pourquoi. Des modélisations mathématiques et des analyses structurales (cristallographie) montrent que les anticorps perdant ce pouvoir neutralisant entrent en compétition avec ACE2 pour les points de fixation au RBD. C’est principalement la mutation N501Y qui affaiblit la liaison des anticorps. Certains anticorps référencés et actuellement utilisés en thérapie ne neutralisent pas le B.1.1.7, en raison d’un contact altéré avec cet acide aminé 501. L’influence des suppressions 69-70 et 144 est plus modeste.
Finalement, la protection par les anticorps dirigés contre une souche de la 1ère vague diminue, mais reste robuste contre le variant anglais. Il n’y a donc pas de réel échappement vaccinal, ce qui suggère que les vaccins actuels seront efficaces contre cette souche. De plus, plusieurs autres mécanismes participent à la protection : la réponse T, la fonction Fc des anticorps (voir lettre News-COVID-19.info 22-28 Février 2021), l’activation du complément. Il n’est toujours pas démontré si les 3 variants (anglais, sud-africain et brésilien) mènent à des symptômes plus sévères ou s’ils permettent un échappement in vivo. Certains vaccins sont actuellement réajustés pour répondre à ces variants. Janssen et Novavax ont récemment déclaré avoir des candidats efficaces contre le variant anglais. On ne sait pas non plus si la protection provoquée par un des 3 variants est efficace contre les autres ou contre les souches de la 1ère vague.