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Retarder l’injection de la seconde dose rend le vaccin plus efficace

En décembre 2020, le Royaume-Uni a changé le régime d’administration des vaccins Pfizer-BioNTech et Astrazeneca en espaçant les injections de plus de 12 semaines au lieu des 4 habituelles. Le but était d’accélérer la couverture vaccinale de la population avec une seule dose afin de limiter l’incidence de cas sévères de COVID-19. Cette politique s’appuyait sur des estimations et des extrapolations d’efficacité à partir des essais cliniques mais aussi de données sur d’autres vaccins. En condition réelle, nous ne connaissons pas la durée de protection d’une seule dose d’un vaccin ARNm, ni comment la réponse immune évolue après des injections plus espacées, ou encore l’efficacité de cette stratégie face aux variants préoccupants (Variants Of Concern, VOC).

Pour répondre à ces questions, un consortium multidisciplinaire anglais (mené par les universités d’Oxford et de Newcastle) a conduit l’étude SIREN sur le personnel des hôpitaux du National Health Service. L’essai a enrôlé 25 066 participants entre décembre 2020 et mars 2021, période où le variant Alpha dominait. Les résultats montrent qu’après une seule dose de Pfizer-BioNTech, la réponse anticorps est clairement induite mais avec des niveaux d’anticorps neutralisants relativement faibles et avec une efficacité affaiblie contre les variants Bêta et Delta. On observe une protection graduelle et robuste contre les formes asymptomatiques et symptomatiques de COVID-19, jusqu’à atteindre une protection de 72% après 3 semaines qui reste stable pendant plusieurs semaines. Les individus préalablement infectés ont des réponses anticorps et cellulaires T plus élevées après cette 1ère injection.

Les chercheurs ont aussi comparé la protection et les réponses immunes après que la 2nde dose ait été administrée 2 à 5 semaines (intervalle court) ou 6 à 14 semaines (intervalle long) après la 1ère dose. Cette étude PITCH a ciblé 589 participants de SIREN dont 43% avaient déjà été infectés par le SARS-CoV-2. On observe un rebond de la réponse-anticorps après la 2nde injection. Selon l’intervalle court, les niveaux d’anticorps atteignent un pic au bout d’une semaine puis déclinent de 12 fois sur les 3 mois suivants. Selon l’intervalle long, les taux d’anticorps neutralisants sont 2 à 4 fois plus élevés. En revanche, les réponses cellulaires T CD4 et CD8 anti-Spike restent stables et robustes, quel que soit l’intervalle, mais un court intervalle favorise la production d’IFNɣ par ces cellules, alors qu’un long favorise la production d’IL2. La neutralisation du variant Bêta est affaiblie dans les deux régimes, mais apparaît quand même meilleure quand l’intervalle est long. La réponse cellulaire B reste stable pendant 12 semaines après la 1ère dose ; après la 2nde (intervalle long) elle augmente de 7 fois chez les individus naïfs. Les individus préalablement infectés ont des réponses-anticorps et cellulaires 2 à 3 fois supérieures et plus rapides, ainsi qu’une meilleure neutralisation croisée contre les VOC. Cet avantage augmente si l’infection arrive plus longtemps après la 1ère injection.

Cette étude justifie a posteriori la pertinence de la politique anglaise en montrant que la réponse-anticorps est plus efficace lorsque l’intervalle entre 2 injections de Pfizer-BioNTech est plus long que les conventionnelles 4 semaines. Ce timing favorise la production d’IL2 par les cellules T, ce qui stimule par conséquent la production d’anticorps par les cellules B. De plus, une seule injection protège contre le variant Alpha pendant plusieurs semaines (la durée précise reste cependant à déterminer). Si les niveaux d’anticorps chutent rapidement après vaccination, le niveau des cellules B et T est plutôt stable et peu influencé par la longueur de l’intervalle. Les infections préalables améliorent les réponses-anticorps et cellulaires, mais la longueur de l’intervalle a peu d’influence dans ce cas, puisque la même chose s’est déjà produite entre l’infection et la 1ère injection.

Cette étude est toujours en cours pour évaluer les réponses immunes sur des temps plus longs mais aussi les effets d’une 3ème dose. Le régime de vaccination doit donc être adapté selon l’importance des contagions locales, la prédominance des VOC et la disponibilité des stocks.

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