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Vulgarisation scientifique des avancées de la recherche sur la COVID-19

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Pourquoi les hommes meurent-ils davantage ?

Il existe une disparité homme/femme dans la mortalité causée par la COVID- 19 : les hommes ont plus de risques que les femmes de déclarer une forme grave et de décéder. Ils représentent ainsi 60% des morts. C’est un constat de l’ensemble de la communauté scientifique. Mais la raison de cette différence reste inconnue et fait débat : les chercheurs ne sont pas tous du même avis.

L’étude de T. Takahashi et ses collaborateurs (Yale University, New Haven, USA) tente de démontrer que cette différence de mortalité provient d’un système immunitaire qui fonctionnerait différemment. Cependant, l’équipe de H. Shattuck-Heidorn (University of Southern Maine, Portland, USA) remet cette l’étude en cause et avance une hypothèse différente.

Takahashi et ses collaborateurs ont analysé les différences de système immunitaire entre les hommes et les femmes chez des patients atteints de forme modérée de COVID-19. Ces chercheurs ont examiné ainsi la charge virale SARS-CoV-2, la réponse-anticorps face au virus et d’autres marqueurs immunitaires comme les cytokines (petites protéines qui permettent la communication entre les différents acteurs de l’immunité). L’étude portait sur 98 participants hospitalisés entre le 18 mars et le 9 mai 2020. T. Takahashi et ses collaborateurs montrent premièrement qu’il n’y a pas de différence significative de charge virale entre les hommes et les femmes, que ce soit dans les prélèvements nasopharyngés (prélèvements de 14 hommes et 14 femmes) ou salivaires (prélèvements de 9 hommes et 12 femmes). De même, il n’y aurait pas de différence dans le taux d’anticorps en réponse au SARS-CoV-2.

En revanche, le taux de plusieurs cytokines pro-inflammatoires est supérieur chez les hommes. Au contraire, le taux de lymphocytes T est supérieur chez les femmes. Pour les lymphocytes B, la différence entre les hommes et les femmes n’est pas significative. L’équipe de T. Takahashi a donc montré une réponse immune différente chez les hommes et les femmes.

D’autres scientifiques, dont H. Shattuck-Heidorn et ses collaborateurs, critiquent la méthodologie et les conclusions de l’étude précédente. Il en accuse plusieurs limites. La première serait une cohorte d’individus trop faible pour les différentes analyses. Pour l’étude des lymphocytes T par exemple, l’analyse ne porte que sur 6 hommes et 6 femmes. Il apparaît donc difficile de conclure à partir d’effectifs si faibles. De plus, des disparités sont apparues dans les mesures. De surcroît, elles n’ont pas été assez répétées pour être vérifiées. La conséquence pourrait être que les quelques différences entre hommes et femmes dans les marqueurs du système immunitaire seraient artificielles.

Pour ces chercheurs, les principales explications de la différence homme- femme dans la mortalité de la COVID-19 seraient les facteurs sociaux, comme l’adhésion au port du masque par exemple. Cette hypothèse serait supportée par le fait que l’amplitude de la différence de mortalité homme-femme varie selon les zones géographiques.

L’équipe de T. Takahashi a ensuite répondu aux différentes critiques et à la remise en cause de leurs conclusions. T. Takahashi a commencé par affirmer que d’autres études parues ensuite vont dans son sens. Plusieurs ont démontré des réponses immunes différentes chez l’homme et la femme face à l’infection, certaines sur des modèles animaux pour lesquels les facteurs sociaux n’entrent pas en compte. Il admet que le nombre d’individus de son étude est limité mais que ce travail doit servir de base à d’autres investigations. Il souligne que les différences biologiques entre les hommes et les femmes et les facteurs sociaux sont intimement liés et ne sont pas incompatibles. Il conclut en rappelant que son étude n’est qu’une pièce du puzzle à une question sûrement multifactorielle.

En conclusion, la différence de mortalité entre hommes et femmes n’est pas encore bien comprise, même si des éléments de réponse commencent à être apportés. T. Takahashi et collaborateurs ont mené une première étude montrant que cela pourrait provenir d’une différence dans la réponse immune. Cette hypothèse se doit d’être vérifiée par des études supplémentaires. D’autres scientifiques comme H. Shattuck-Heidorn mettent en cause cette thèse et font l’hypothèse de facteurs sociaux. Cette question fait débat dans la communauté scientifiques et d’autres éléments de réponse devront être découverts dans les prochains mois.

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