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Vulgarisation scientifique des avancées de la recherche sur la COVID-19

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Les adultes cancéreux face au vaccin

Des essais cliniques indépendants ont montré que les vaccins à ARNm de Pfizer et Moderna protégeaient à 94-95% contre les formes symptomatiques de COVID-19. Mais les patients immunodéprimés, qui développent une réponse immune généralement moins robuste, n’étaient pas inclus dans ces essais cliniques. Pourtant, parmi eux figurent les patients atteints de cancer et traités par chimiothérapie dont le suivi a été altéré durant la pandémie. De plus, leur risque de décès est 10 à 30 fois plus élevé que dans la population générale. Qu’elle soit induite par une infection naturelle ou par la vaccination, la réponse immune anti-SARS-CoV-2 est mal connue chez ces patients.

Pour combler cette lacune, des chercheurs américains de l’Université d’Arizona ont évalué les effets du vaccin Pfizer sur 53 patients traités par immunosuppresseurs pour des tumeurs solides, ainsi que sur 50 patients sains. Le but est de mesurer les niveaux d’anticorps neutralisants mais aussi l’efficacité de la réponse cellulaire. Les prélèvements sanguins ont été effectués le jour de la 1ère dose, le jour de la 2nde dose (3 semaines après), puis 5 à 11 jours après.

Après la 1ère injection, les taux d’anticorps augmentent progressivement dans les 2 groupes. Tous les patients sains ont développé des anticorps neutralisants mais seulement 67% des patients cancéreux. Ce chiffre monte à 80% après la 2nde injection et les niveaux augmentent d’environ 3 fois. Ces patients développent 11 fois moins d’anticorps anti-RBD (domaine de Spike qui interagit avec le récepteur ACE2 et qui permet l’entrée virale). Au niveau de la réponse cellulaire, la plupart ont en revanche développé des réponses TCD4 et TCD8 dirigées contre Spike, bien qu’elles soient légèrement plus faibles mais comparables. Après la 2nde injection, les patients développent des cellules-B mémoires spécifiques du RBD, mais 10 fois moins nombreuses. Il ne s’agit pas de la réactivation de B-mémoires préexistantes (issues de précédentes infections à coronavirus), mais bien des cellules produites par la vaccination. Après la vaccination, certains patients traités par immunosuppresseurs ont donc développé une immunité mémoire qui  devrait être réactivée par la suite (réponse anamnestique).

Afin d’évaluer les effets d’une 3ème dose du vaccin et valider cette théorie, les chercheurs ont réalisé un essai clinique supplémentaire sur 20 patients cancéreux issus de la même cohorte. Cette injection a été effectuée entre 42 et 111 jours après le dernier prélèvement sanguin. On n’a relevé aucun effet secondaire sérieux dans les semaines suivant l’injection. Chez 16 participants, on observe une modeste, mais significative, augmentation des anticorps anti-RBD ainsi que 3 fois plus d’anticorps neutralisants. On détecte même des anticorps chez deux patients qui n’en avaient pas développé après les deux premières injections. En revanche, la réponse cellulaire T n’est pas stimulée pour des raisons inconnues. Contrairement aux patients sains, les niveaux des B-mémoires ne sont pas corrélés aux niveaux des anticorps sanguins, ce qui est probablement dû au fait que les différents aspects de la réponse immune ne sont pas coordonnés.

Ce travail montre que les thérapies anticancéreuses affectent la réponse anticorps et cellulaire induite par le vaccin Pfizer (sauf la réponse cellulaire T, réduite seulement légèrement). S’il est encourageant de voir que la majorité des patients ont développé au moins une réponse anticorps ou cellulaire après vaccination, et que la réponse-anticorps est améliorée par une 3ème injection, il reste à évaluer si c’est suffisant pour protéger contre des formes sévères de COVID-19. Il faut aussi déterminer l’influence du timing d’administration des chimiothérapies et du vaccin, ainsi que confirmer ces résultats sur d’autres types de cancer et des cohortes plus étendues.

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