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Vulgarisation scientifique des avancées de la recherche sur la COVID-19

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Deux nouvelles études confirment qu’Omicron résiste aux anticorps

La pandémie de COVID-19 se prolonge et le SARS-CoV-2 continue d’évoluer. D’abord détecté en novembre 2021 au Botswana et en Afrique du Sud, le variant préoccupant (Variant Of Concern, VOC) Omicron (B.1.1.529) est en passe de supplanter le variant Delta et devenir dominant. Son temps de doublement se situerait entre 1,2 et 3,6 jours dans une population immunisée. Il porte plus de 55 mutations dans tout son génome, dont 32 dans Spike : 7 dans le NTD (N Terminal Domain), 15 dans le RBD (Receptor Binding Domain, principale cible des anticorps neutralisants), 3 près du site de clivage par la furine, et 6 dans la région S2. Au moins 11 de ses mutations ont déjà été observées chez d’autres variants. En plus de sa transmissibilité élevée, on suppose que ces mutations lui permettent d’échapper aux anticorps neutralisants dirigés contre les souches précédentes. Plusieurs équipes de recherche travaillent actuellement sur cette question.

Une équipe américaine de l’université de Columbia a évalué la capacité de plusieurs sources d’anticorps à neutraliser Omicron in vitro. Ils ont prélevé d’abord les anticorps sanguins de 10 patients COVID-19 convalescents (entre 9 et 120 jours après l’apparition des symptômes). Ces échantillons contiennent 32 fois moins d’anticorps capables de neutraliser Omicron que d’anticorps neutralisant le variant ancestral D416G. Chez des patients vaccinés avec Pfizer-BioNTech (entre 15 et 213 jours après la 2eme injection) ou Moderna (6-177 jours), le potentiel de neutralisation chute respectivement de 21 et 8,6 fois. Avec Johnson & Johnson (50-186 jours) ou Astrazeneca (91-159 jours), c’est encore pire car aucun patient vacciné n’est capable de neutraliser Omicron. Mais après une dose de rappel Pfizer-BioNTech ou Moderna chez ces individus vaccinés, la neutralisation d’Omicron redevient efficace malgré une chute de 6,5 fois par rapport au D416G.

Ensuite, les chercheurs ont évalué 19 anticorps neutralisants connus et dirigés contre Spike (17 ciblant le RBD, 2 le NTD), dont 9 utilisés en thérapie. 17 d’entre eux perdent complètement ou partiellement (plus de 100 fois) leur activité neutralisante. Les anticorps de classe 4, qui ciblent une zone cryptique du RBD en position « up », restent les plus efficaces. Les chercheurs identifient ensuite les rôles spécifiques des nouvelles mutations dans la résistance : Q493R rend inefficace les anticorps de classes 1 & 2 qui empêchent la fixation au récepteur, N440K et G446S altèrent certains anticorps de classe 3, S371L altère la neutralisation de toutes les classes d’anticorps.

Une autre étude de chercheurs français (Institut Pasteur de Paris) et belges (hôpital universitaire de Leuven) a abouti à des conclusions similaires. Ils ont isolé un variant Omicron « de terrain » (prélevé sur un voyageur non-vacciné venant d’Egypte et arrivé en Belgique) puis réalisé un modèle structural à partir de sa séquence protéique. Comme lors de l’étude précédente, ils confirment que les mutations d’Omicron altèrent la fixation des 4 classes d’anticorps neutralisants. Parmi 9 anticorps thérapeutiques, 6 sont inefficaces contre Omicron (dont le Bamlanivimab, qui ne neutralise pas Delta non plus) et les autres perdent de 20 fois leur efficacité car ils se fixent moins bien sur Spike (Cilgavimab, Andintrevimab). Seul le Sotrovimab neutralise Omicron aussi efficacement que Delta, mais 3 fois moins efficacement que D416G.

On a ensuite analysé les anticorps de 54 individus vaccinés (16 Pfizer-BioNTech, 18 Astrazeneca, et 20 ayant reçu 3 doses de Pfizer) afin d’évaluer leur capacité à neutraliser Omicron, Delta ou la souche ancestrale D416G. Les prélèvements ont été réalisés 5 mois après la 2ème injection et 1 mois après la 3ème et les niveaux d’anticorps neutralisants sont faibles car ils ont chuté avec le temps. Les résultats montrent une activité antivirale efficace contre D416G, une plus faible contre Delta et aucune contre Omicron. La 3ème dose rétablit une forte capacité à neutraliser les 3 souches et augmente le taux d’anticorps jusqu’à 49 fois. La neutralisation d’Omicron est 18 fois plus faible que celle de D416G et 6 fois plus faible que celle Delta. Avec une cohorte de 40 patients COVID-19 convalescents, le constat est similaire. Entre 6 et 12 mois après l’apparition des symptômes, les taux d’anticorps capables de neutraliser D416G ou Delta sont relativement stables et environ 2 fois plus élevés que chez les vaccinés, mais incapables de neutraliser Omicron pour 2/3 des patients. Une dose de rappel avec Pfizer-BioNTech augmente le taux d’anticorps ciblant D416G de 137 fois et restaure la neutralisation d’Omicron chez tous les patients. Son efficacité est alors réduite de 53 par rapport à D416G et 23 fois par rapport à Delta.

Omicron a donc ouvert un nouveau chapitre dans la pandémie de COVID-19, et ces travaux expliquent comment il peut se propager aussi efficacement dans une population immunisée. Les individus vaccinés ou déjà infectés demeurent à risques face à Omicron et les thérapies par anticorps ne sont plus efficaces. Les précédents variants avaient surtout développé des résistances contre les anticorps de classe 1 et 2, et ceux ciblant le NTD. Omicron, lui, résiste à toutes les classes d’anticorps neutralisants. Si ce variant accumule encore 2 ou 3 mutations à des endroits stratégiques de Spike, il deviendra complètement résistant. Il est désormais impératif que les vaccins et les thérapies par anticorps soient reformulés. Mais cette fois, des régions plus conservées du virus doivent être ciblées pour que la stratégie vaccinale soit plus efficace à long terme. En attendant, les doses de rappel doivent être massivement déployées mais nous ne savons pas combien de temps cela sera utile.

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