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Comment le SARS-CoV-2 attaque le système olfactif ?

L’anosmie ou perte d’odorat est un symptôme commun de la COVID-19. Le mécanisme de ce phénomène est mal connu mais certaines études suggèrent que les nerfs olfactifs pourraient servir de voies d’entrée du SARS-CoV-2 dans le cerveau. De manière plus générale, les études sur les muqueuses olfactives et les bulbes olfactifs humains sont peu avancées car il est très difficile d’obtenir des échantillons de bonne qualité. Au niveau de la cavité nasale, la muqueuse olfactive se compose d’un archipel d’îlots cellulaires de tailles variables disséminés dans la muqueuse respiratoire. Certains îlots contiennent des neurones olfactifs. Collecter des échantillons purs de muqueuses olfactives ou respiratoires est donc impossible. De plus, prélever les bulbes olfactifs (nous en avons 2 en tout) sur des sujets vivants peut avoir des conséquences désastreuses au vu de leur position inférieure dans le cerveau.

Des chercheurs allemands et belges (Max Planck Institute, Frankfort ; Hôpital Universitaire de Leuven) ont mis au point une procédure clinique par endoscopie, inspirée des chirurgies crâniennes, afin de prélever des bulbes olfactifs ainsi que des muqueuses respiratoires et olfactives (étude ANOSMIC-19). Cette technique a été appliquée sur une cohorte de 85 patients dont 68 COVID-19 sévères (une à deux heures après leur décès), 15 patients non infectés et 2 convalescents (mai 2020 – avril 2021). En visualisant l’ARN du SARS-CoV-2 par fluorescence, il devient possible de localiser les sites de réplication du virus et ainsi de mieux comprendre comment il attaque le système olfactif.

Quels sont les résultats de cette étude ? La muqueuse respiratoire est un site majeur de réplication virale, la cible principale étant les cellules ciliées (qui déplacent la couche de mucus produite par les cellules en gobelet), ce qui confirme les données de la littérature. Dans la muqueuse olfactive, le virus cible principalement les cellules sustentaculaires qui enveloppent et soutiennent les neurones olfactifs, mais non les neurones eux-mêmes. Ces cellules expriment ACE2 et TMPRSS, respectivement le récepteur et une protéase qui permettent l’entrée du SARS-CoV-2 dans la cellule. Le paysage des sites d’infections de cette muqueuse est très hétérogène. Chez un des patients infectés, les chercheurs confirment que l’infection des cellules sustentaculaires ne modifie pas le profil d’expression des gènes des neurones olfactifs : il n’y a donc pas de réponse indirecte à l’infection. Chez plusieurs sujets, le virus peut aussi infecter les couches de leptoméninges entourant les bulbes olfactifs, mais non les neurones des bulbes eux-mêmes.

Ces résultats montrent clairement que le SARS-CoV-2 n’est pas un virus neurotropique et que les neurones olfactifs ne permettent pas au SARS-CoV-2 d’accéder au cerveau. L’anosmie semble être un processus multifactoriel. On en sait très peu sur les cellules sustentaculaires mais elles semblent avoir des fonctions différentes chez les rongeurs et les humains. Ce qui est sûr, c’est qu’elles sont en contact étroit avec les neurones olfactifs. Lorsqu’elles sont infectées par le SARS-CoV-2, elles ne fournissent probablement plus aux neurones le soutient structurel et physiologique nécessaire, ce qui conduit à l’altération de leurs fonctions. La libération de chimiokines inflammatoires par les cellules infectées pourrait aussi favoriser ce processus. Les cellules sustentaculaires, comme les neurones olfactifs, sont renouvelées toute au long de la vie grâce aux cellules souches (basales) présentes dans la muqueuse olfactive, expliquant ainsi le caractère transitoire de l’anosmie. Il est donc crucial de mieux comprendre le rôle des cellules sustentaculaires sur les neurones olfactifs pour pouvoir proposer de nouvelles pistes thérapeutiques.

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