Le Paquinimod, inhibiteur spécifique des alarmines S1001A8/A9, réduit significativement le nombre de la sous-population de PNN (polynucléaires neutrophiles anormaux). Cette molécule semble avoir un potentiel thérapeutique pour supprimer la réponse immunitaire incontrôlée associée à la pathologie observée dans les formes sévères de COVID-19. Comment agit le Paquinimod ?
Il faut se rappeler que l’immunité innée est une des premières lignes de défense contre les pathogènes dans le système immunitaire des mammifères. La plupart des cellules portent la machinerie protectrice de l’immunité innée et sont capables de reconnaître des virus les envahissant grâce au récepteur PRR (Pattern Recognition Receptor). Ce récepteur permet de déclencher des voies de signalisation menant à l’expression de cytokines et activant des gènes de l’immunité pour l’élimination des pathogènes.
Lors d’une infection SARS-CoV-2, une réponse immunitaire trop importante apparaît, causant une immunopathologie. Les PNN sont des leucocytes circulant du sang vers les tissus infectés en réponse à un stimuli inflammatoire, en protégeant les cellules par phagocytose des bactéries et des champignons. Leur rôle dans la défense antivirale n’a pas été clairement caractérisé jusqu’ici. Néanmoins, leur nombre a significativement augmenté chez les patients atteints d’une forme grave de COVID-19. Chez ces patients, une nouvelle sous-population de ces PNN apparait : ils ne sont pas porteurs des marqueurs comme CXCR2 et FCGR3B. Les fonctions précises de ces PNN ne sont pas connues.
Il reste à préciser l’action précise du Paquinimod. En réalité, il agit directement sur les alarmines : celles-ci comprennent notamment les Interleukines (IL), les protéines de choc thermique (HSP pour « Heat shock protein ») ou les protéines S100 (comprenant entre autres les protéines S100A8 et S100A9). Ce sont des protéines activatrices du système immunitaire qui sont larguées par les cellules en réponse à une infection ou à une souffrance cellulaire. Elles transmettent les signaux de défense intercellulaires en se fixant aux PRR pour activer les cellules immunitaires. La réponse aux alarmines implique l’activation des leucocytes, la production de médiateurs inflammatoires (cytokines par exemple), le recrutement de PNN et de monocytes, dans le but d’éliminer les microorganismes étrangers responsables des dommages cellulaires. Une production incontrôlée de ces alarmines est dangereuse et peut même être fatale pour l’organisme dans certains cas. Dans des conditions physiologiques, des taux élevés d’alarmines S100A8/A9 sont stockés dans les PNN. Après avoir été infectés par des bactéries, les PNN excrètent de grandes quantités de ces alarmines.
Les chercheurs ont étudié la réponse immunitaire innée précoce au sein de modèles animaux macaques et souris lors d’une infection par le SARS-CoV-2. Le transcriptome (niveau d’expression des gènes) des poumons et du sang a tout d’abord été analysé à J0, J3, et J5 après infection. Il a pu être ainsi montré que l’infection par le SARS-CoV-2 provoque une réponse antivirale non spécifique ou une réponse antibactérienne, accompagnée d’une augmentation des PNN dans le poumon à un stade précoce de l’infection. La réponse antibactérienne et PNN serait déclenchée par l’alarmine S100A8. Ces réponses ne sont pas dues à une co-infection bactérienne. L’importante expression de S100A8 et de PNN est observée lors de l’infection à SARS-CoV-2, mais pas lors d’une infection par d’autres virus. L’infiltration d’une sous-population de PNN anormaux dans les poumons est ensuite apparue.