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Bilan sur la réponse-anticorps contre le SARS-CoV-2

Le SARS-CoV-2 s’est répandu rapidement car la population mondiale était majoritairement naïve d’un point de vue immunologique. Si l’on a appris à mieux le connaître, beaucoup de questions se posent encore.

Ce qu’on sait aujourd’hui, c’est que les 4 coronavirus humains endémiques (HCoVs : alpha- et bêta-coronavirus, NL63, 229E) provoquent des infections respiratoires généralement bénignes, mais le SARS-CoV-2 est à l’origine de manifestations cliniques variées, allant d’asymptomatique à la mort. De nombreux facteurs déterminent la gravité de la COVID-19, qu’ils soient viraux (infectiosité, évolution) ou liés à l’hôte (âge, comorbidités, état immunitaire). Le SARS-CoV-2 code pour 4 protéines structurales et 25 protéines non structurales ou accessoires, mais la réponse immune est majoritairement dirigée contre les protéines structurales S (Spike, qui régit l’entrée virale) et N (Nucléocapside, qui organise le génome viral). Lors de la réponse immune, Spike et son RBD (Receptor Binding Domain) sont les cibles majeures des anticorps neutralisants.

Aperçu de la réponse immunitaire humorale au SARS-CoV-2

Mais plus d’un an après le début de la pandémie, de nombreuses questions subsistent, notamment concernant la réponse-anticorps anti-SARS-CoV-2 :

  • Les précédentes infections par des HCoVs peuvent-elles nous protéger contre le SARS-CoV-2 ?

Ce n’est pas clair car les études en ce sens sont rares et contradictoires. Mais la question reste ouverte car la plupart des personnes non-infectées montre une réactivité croisée contre les protéines Spike (5% des patients) et Nucléocapside (10-15%) du SARS-CoV-2. Ces anticorps sanguins (IgG) sont majoritairement dirigés contre la sous-unité S2 de Spike, mais seulement 1% des échantillons contiennent des IgG anti-RBD du SARS-CoV-2 (le RBD est situé dans S1). Ces fréquences sont plus élevées chez les enfants, ce qui est probablement dû à des expositions répétées aux HCoVs. On ne sait pas très bien non plus si cette protection croisée est soutenue par la réponse humorale ou cellulaire.

  • La réponse anticorps est-elle efficace et protectrice ?

Plusieurs études montrent que les anticorps IgG neutralisants, ciblant majoritairement le RBD et parfois d’autres domaines, bloquent efficacement l’infection virale in vivo. Le taux minimal d’IgG, requis pour la protection, n’a toutefois pas encore été défini. S’il est certain que ces anticorps sont essentiels à la protection, ils semblent moins efficaces lorsque l’infection est déjà bien établie. En revanche, il est certain que les cas sévères et les patients âgés développent des taux d’IgG plus élevés, alors que les enfants, majoritairement asymptomatiques, développent des niveaux plutôt bas. Ces observations suggèrent que la réponse antivirale innée, la réponse cellulaire, les fonctions effectrices (Fc) des IgG, ou le système du complément jouent un rôle majeur dans l’évolution de la maladie, mais ces mécanismes immunitaires sont moins bien caractérisés.

  • Comment la réponse anticorps anti-SARS-CoV-2 évolue-t-elle dans le temps ?

A la suite d’une primo-infection, les anticorps anti-RBD commencent à être produits 12 jours après l’apparition des symptômes et atteignent un pic 2 à 4 semaines après. Certaines infections virales apportent une protection à vie après rétablissement, mais ce n’est généralement pas le cas des HCoVs qui induisent des protections plus courtes, ce qui participe aux réinfections fréquentes par des HCoVs. Le taux d’IgG anti-S semble fléchir légèrement 8 semaines après l’infection, et cette décroissance est plus rapide pour les anti-RBD et encore davantage pour les IgA. Les IgA régissent la défense des muqueuses (dont respiratoire), mais pourtant l’importance de ce mécanisme dans la COVID-19 n’a pas été définie. La baisse des IgG est cependant moins marquée chez les cas sévères. Suite à l’infection, un premier pool de cellules B extrafolliculaires va produire des taux élevés d’anticorps de manière provisoire. Ensuite, les cellules B qui ont maturé en parallèle dans les centres germinatifs vont prendre le relai afin d’assurer une production d’anticorps plus pérenne et spécifique, avec des taux moins élevés. Le fonctionnement de ces centres germinatifs semble altéré chez les patients les plus sévères. Si les taux de cellules B mémoires anti-RBD semblent stables jusqu’à 8 mois après les symptômes, la durée précise de la protection n’est pas encore connue. En conséquence, les potentiels cas de réinfection sont mal caractérisés.

  • Les anticorps produits par la vaccination sont-ils efficaces ?

Plusieurs vaccins actuellement déployés montrent plus de 90% (Moderna, Pfizer, Janssen) d’efficacité pour protéger de la COVID-19. En ciblant uniquement la protéine S, ces vaccins induisent de hauts niveaux d’anticorps IgG neutralisants dont les pics sont comparables, ainsi que les taux de cellules B mémoires, à celui des patients COVID-19 sévères. Ils induisent une activation efficace des centres germinatifs. Là encore, la durée de cette protection n’est pas encore clairement définie.

  • La réponse-anticorps est-elle efficace contre les variants ?

Même si le SARS-CoV-2 mute relativement peu comparé à d’autres virus, une centaine de mutations ont été recensées depuis la souche première de Wuhan. Les variants préoccupants arborent certaines mutations dans le RBD, conférant au virus une meilleure affinité pour le récepteur ACE2 et une perte de sensibilité aux anticorps IgG neutralisants, qu’ils soient induits par l’infection naturelle, les vaccins ou encore administrés en thérapie passive. Par exemple, les variants Gamma (ɣ, brésilien) et Bêta (β, sud-africain) (qui partagent la mutation de E484), Epsilon (𝛇, californien) (L452R) et Delta (δ, indien) (L452R et T478K) sont capables d’échappement immunitaire, c’est-à-dire de résister. L’efficacité de certains vaccins semble altérée face aux variants, mais on ne sait pas s’ils sont suffisants pour éviter les formes sévères de COVID-19 induites par ces mêmes souches.

Malgré les remarquables efforts de la communauté scientifique au cours des 16 derniers mois, de nombreuses questions restent encore en suspens. De manière similaire à la grippe, il faudra régulièrement évaluer l’efficacité des vaccins face aux variants actuels et futurs. Cela permettra de savoir s’il suffira d’effectuer un rappel avec les vaccins actuels pour en être protégé ou s’il faudra mettre à jour leur conception. Il sera aussi nécessaire de définir précisément si ces vaccins, ou une infection naturelle, permettront une protection croisée contre de futures souches de coronavirus.

Réponses des cellules B anti-SARS-CoV-2

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