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Vulgarisation scientifique des avancées de la recherche sur la COVID-19

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Une analyse cellulaire multi-organe post-mortem

Les manifestations cliniques de la COVID-19 peuvent aller des infections asymptomatiques à la mort, souvent causée par un syndrome respiratoire aigu, une hyper-inflammation et une défaillance multiple d’organes. Mais de nombreuses questions subsistent sur la physiopathologie de cette maladie, en particulier, parce que les études génétiques sont compromises par la dégradation du matériel prélevé post-mortem. Des chercheurs américains (Université d’Harvard, Massachussetts Institute of Technology) ont établi une banque d’organes issus de prélèvements sur 17 patients COVID-19 décédés. La banque couvre 11 organes au total. A partir de ce matériel, ils ont effectué un transcriptome à l’échelle de la cellule unique (sc/snRNA-seq), c’est-à-dire l’analyse complète des gènes sur- ou sous-exprimés chez les sujets COVID-19.

Dans les poumons, 28 sous-types cellulaires sont identifiés parmi des cellules parenchymateuses, endothéliales et du système immunitaire. On observe de nombreux changements au niveau des programmes transcriptionnels de plusieurs types cellulaires. Les pneumocytes AT2 montrent une réponse antivirale et inflammatoire marquée, ainsi qu’une mort cellulaire programmée (STAT1). Les gènes liés à la production du surfactant, substance lubrifiante nécessaire aux fonctions respiratoires, sont sous-exprimés. Pour combler la destruction de l’épithélium respiratoire (pneumocytes AT1) par le virus, plusieurs stratégies de régénération sont mises en place par les cellules progénitrices AT2, mais s’avère trop peu efficaces pour reconstituer les alvéoles.

En parallèle, on observe une expansion des fibroblastes. Le taux d’ARN viral est le plus élevé dans les macrophages, mastocytes et cellules endothéliales. Il est bas dans les pneumocytes car ils meurent massivement. On en retrouve aussi dans quelques cellules sanguines spécifiques, dont les cellules B. Les cellules porteuses du génome viral amorcent des programmes immunitaires spécifiques, mobilisés par l’émission des protéines TNF, API et certaines cytokines (CXCL10, CXCL11). Les analyses montrent que plus le virus se multiplie, plus la mort survient rapidement après déclaration des symptômes.

Pour évaluer l’impact du contexte tissulaire in vivo, ces chercheurs ont eu recours à une cohorte supplémentaire de 14 donneurs (dont 3 sains) et un algorithme de profilage spécifique (DSP). Cette analyse spatiale prend en compte les zones pulmonaires non infectées, et montre que chez les patients COVID-19, les alvéoles connaissent un net accroissement des gènes activés par l’interféron ainsi que par les stress oxydatifs (agressions causées par des molécules dérivant de l’oxygène comme les radicaux libres). Cependant, les gènes liés au TNF⍺, IL2-STAT5 et TGFβ sont beaucoup moins exprimés. On note une diminution de l’expression de gènes liés à l’intégrité de l’épithélium (claudins et jonctions serrées), ce qui illustre la destruction de la barrière alvéolaire. Contrairement à d’autres études, on retrouve très peu de génomes viraux en dehors des poumons (foie, cœur, reins). Dans le cœur, le gène PLCG2, dont la fonction est inconnue, est très surexprimé.

En intégrant une étude GWAS (Genome Wide Association Study) à leurs données, ils ont identifié certains gènes associés aux risques COVID-19 : 14 gènes sont surexprimés dans les poumons de patients malades et 21 surexprimés spécifiquement dans au moins un type cellulaire. Les pneumocytes AT2 sont les cellules qui montrent le plus de gènes de prédisposition aux cas sévères (FOXP4, OAS3, FYCO1, NFKBIZ, DPP9). Les autres sont les cellules ciliées, les lymphocytes TCD8 et les macrophages (CCRL2). Les gènes de prédisposition sont issus de régions génomiques multiples.

Cette analyse concernant un bon nombre d’organes, réalisée sur une bio-banque de cas sévères COVID-19 autopsiés, est complémentaire d’une autre ne portant que sur les poumons (voir article précédent). Cette étude fournit des données essentielles à la communauté scientifique étudiant la physiopathologie de la COVID-19 et de futures méta-analyses lui donneront encore plus d’importance.

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