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Les scénarios de fin de pandémie

La vaccination, c’est d’abord l’espoir d’en finir vraiment avec la pandémie. En revanche, cela ne signifie pas en finir avec le SARS-CoV-2. En effet, de nombreuses personnes ne seront pas vaccinées en raison d’un accès limité dans certains pays ou d’un refus. De plus, les vaccins ne bloquent pas toujours la transmission du virus et la durée de protection après immunisation n’est pas clairement définie. Ces conditions donnent au virus la possibilité de persister et de muter, c’est-à-dire de modifier ses propriétés. Le SARS-CoV-2 va-t-il devenir un virus endémique avec des pics saisonniers ? C’est le scénario le plus probable.

Faire des prédictions, en s’appuyant sur les autres épidémies, est cependant difficile. Nous cohabitons depuis longtemps avec des virus saisonniers, comme la grippe ou les coronavirus communs. Le SARS-CoV-2 est toutefois plus virulent et transmissible que les coronavirus communs, mais moins que le SARS-CoV et le MERS-CoV. La grippe espagnole de 1918 était, elle aussi, apparue en dehors des pics saisonniers et par vagues successives, mais avec une mortalité bien supérieure. Cette souche H1N1 a provoqué des épidémies jusque dans les années 1950, puis lui a succédé une souche H2N2 issue d’un réservoir animal. D’autre part, la poliomyélite n’a jamais été éradiquée, malgré 2 vaccins efficaces, et cela pourtant sans réservoir animal.

De plus, il est impossible de prédire précisément les prochaines mutations du virus, ni si elles vont moduler sa transmissibilité, sa virulence ou sa capacité d’échappement immunitaire. Nous connaissons les mutations de Spike qui ont augmentées la transmissibilité du SARS-CoV-2, générant des variants dominants dans toutes les régions du globe. Ces mutations ne sont pas forcément associées à une plus grande vitesse de propagation, mais parfois à une plus grande capacité à échapper au système immunitaire. Enfin, l’effet des mutations sur les autres protéines virales est moins connu.

Mais à ces facteurs s’ajoutent en l’occurrence des facteurs aggravants. Les humains non immunisés et animaux réservoirs expliquent largement que des vaccins efficaces ne parviennent pas à globalement éradiquer certains virus et notre coévolution avec eux. Si notre immunité constitue une pression de sélection, qui oriente l’évolution du SARS-CoV-2, plusieurs évènements aléatoires pourraient aussi lui faire prendre des directions inattendues. Le SARS-CoV-2 mute à une fréquence relativement faible, mais il est aussi capable d’évoluer par recombinaison, c’est-à-dire que deux souches de coronavirus au sein du même hôte peuvent échanger des fragments de leur génome. Ces évènements sont potentiellement décuplés chez les personnes immunodéprimées (par exemple, 10 millions de personnes aux USA), qui sont contagieuses beaucoup plus longtemps et hébergent de nombreux variants. De plus, le SARS-CoV-2 est capable d’infecter de nombreuses espèces animales, offrant des possibilités supplémentaires pour acquérir de nouvelles propriétés (mutations d’adaptation ou recombinaison avec des souches animales) pour ensuite les réintroduire chez l’homme. Ce scénario a été responsable de 4 épidémies grippales au cours du siècle dernier (en 1918, 1957, 1968 et 2009). Le nombre élevé de personnes et animaux infectés à travers le globe augmente alors ces probabilités.

Compte tenu de tous ces facteurs, à quoi peut-on s’attendre ? Non seulement la COVID-19 pourrait devenir une maladie saisonnière, mais un autre scénario est envisageable : si le SARS-CoV-2 devient endémique et qu’il co-évolue avec notre immunité, il pourrait évoluer en parallèle chez les animaux selon une autre trajectoire. Les prochaines générations ne seront pas immunisées contre une nouvelle souche de SARS-CoV-2 provenant d’un animal. C’est ce qui s’est passé lors de l’épidémie H1N1 de 2009 : cette souche, reliée à la souche de 1918, avait évolué en parallèle chez le porc. Après avoir disparu pendant des années, le SARS-CoV-2 pourrait ressurgir avec de nouvelles armes.

Selon le premier scénario, avant que le SARS-CoV-2 ne devienne un virus saisonnier, il faut d’abord que la grande majorité de la population soit immunisée. Les campagnes de vaccination actuelles ont justement pour but de contrôler la pandémie COVID-19, non d’éradiquer le SARS-CoV-2. Elles vont donc drastiquement réduire le nombre de variants en circulation. En général, plus un virus est contagieux, plus l’immunité collective doit être élevée pour stopper la transmission : 95% d’immunisés sont requis pour la rougeole, qui est 3 à 5 fois plus contagieuse que la souche de Wuhan. On pourrait alors contrôler la COVID-19 à un pourcentage inférieur.

Que devrons-nous donc faire à l’avenir ? Des campagnes répétées seront nécessaires aux endroits d’émergence ponctuelle, comme pour la poliomyélite, ou pour compenser un éventuel affaiblissement de l’immunité. Ce contrôle nécessitera sûrement de vacciner les enfants qui sont des vecteurs asymptomatiques importants. Une surveillance active des réservoirs et de la dérive antigénique sera nécessaire pour identifier les variants dominants et mettre à jour les vaccins, à l’instar de la grippe. Moderna teste actuellement son vaccin qui a été adapté au variant Alpha (anglais).

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