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Les chauves-souris d’Asie abriteraient de nombreux coronavirus

La plupart des virus humains ont une origine animale. La chauve-souris est notamment un réservoir viral important (comme pour les virus Ebola, Marburg, Coronavirus et Rage) et représente 22% des espèces de mammifères, soit plus de 1420 espèces. En 2019, 6 coronavirus humains (HCoVs) étaient connus : HCoV-229E, HCoV-OC43, HCoV-NL63, HCoV-HKU1, MERS-CoV et SARS-CoV. Au début de l’année 2020, le SARS-CoV-2 a été à l’origine d’une nouvelle épidémie de pneumonies à Wuhan (Chine). Des études rétrospectives ont alors montré que les chauves-souris Rhinolophus affinis (ou Rhinolophe intermédiaire) et R. malayanus (ou fer à cheval malais) étaient porteuses des virus RaTG13 et RmYN02, 2 souches très proches (96% d’homologie pour RaTG13), ce qui est capital puisque le pangolin Manis javanica était porteur de ces 2 lignées, animal dont on a supposé qu’il était à l’origine de la contamination de l’homme. Récemment, les souches STT182 et STT200 ont été identifiées chez R. shameli (chauves-souris fer à cheval de Shamel) au Cambodge (93,6% d’homologie), et RacCS203 (91,5%) a été identifié chez R. acuminatus (chauves-souris fer à cheval acuminée) en Thaïlande. La diversité génétique de ces virus retrouvés chez les chauves-souris d’Asie semble donc avoir été sous-estimée.

Des chercheurs chinois et australiens (Universités de Shandong et Sidney, Center of Conservation de Yuhan) ont identifié des nouvelles souches de coronavirus dans la région de Yunnan en Chine. Entre mai 2019 et novembre 2020, ils ont collecté 411 prélèvements fécaux, oraux ou urinaires issus de 342 chauves-souris (de 23 espèces différentes). Les analyses génétiques ont permis d’identifier 7 nouveaux sarbecovirus (genre Betacoronavirus) et 17 nouveaux Alphacoronavirus. Parmi les sarbecovirus, 4 sont proches du SARS-CoV-2 et 3 sont proches du SARS-CoV. Le génome entier de la souche RpYN06 (Betacoronavirus) partage 94,48% d’homologie avec celui du SARS-CoV-2, faisant de lui la 2nde souche la plus proche après RaTG13 (mais la plus proche si on omet Spike).

Il apparaît clairement que plusieurs espèces ont évolué par recombinaison, c’est-à-dire que 2 souches différentes, cohabitant dans le même animal, peuvent échanger des fragments de génome. Par exemple, certains gènes viraux sont encore plus proches du SARS-CoV-2 : la polymérase virale ou l’ORF10 du RpYN06 sont respectivement identiques à 98,36% et 100%, alors que le gène de Spike chute à 76,33%. Chez les 4 souches proches du SARS-CoV-2, aucune protéine Spike ne possède de site de clivage par la Furine, étape importante pour infecter des cellules humaines. Des expériences in vitro (cytométrie de flux, SPR) montrent que leurs domaines RBD (Receptor Binding Domain, domaine de Spike essentiel à la liaison à ACE2) ne se lient pas (RpYN06), ou faiblement (RsYN04), au récepteur ACE2 humain. Par des modèles informatiques incluant aussi d’autres espèces (49 au total), ces chercheurs ont montré que la répartition géographique des chauves-souris est très hétérogène et que certaines régions, comme Yuhan, représentent un risque élevé d’évolution et de transmission virale.

Avec les récentes découvertes en Thaïlande et au Cambodge, cette étude montre clairement que d’autres virus très proches du SARS-CoV-2 continuent de circuler activement chez les chauves-souris d’Asie, particulièrement du sud et sud-est. En revanche, ces nouvelles souches, ici issues d’une lignée génétique différente, sont porteuses de protéines Spike peu adaptées pour infecter des cellules humaines.

Il faut aussi noter que la diversité génétique des gènes Spike de sarbecovirus, largement sous-estimée, apporte à ces virus une certaine flexibilité d’adaptation. Les risques de transmission sont cependant limités par le fait que les chauves-souris rhinolophides vivent majoritairement dans des forêts denses et évoluent sur de relatives courtes distances, dû à leur morphologie inadaptée aux longs vols.

Enfin les modélisations écologiques de cette étude suggèrent que certaines autres espèces migrent en période de reproduction (avril), ce qui favorise les échanges de souches puisqu’elles partagent les mêmes habitats. Ces régions, qui abritent de nombreux animaux sensibles aux coronavirus, doivent donc faire l’objet d’une surveillance réelle.

C’est ce qu’on peut représenter schématiquement ainsi :

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