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Vulgarisation scientifique des avancées de la recherche sur la COVID-19

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Des auto-anticorps aggraveraient la maladie

Les manifestations cliniques de la COVID-19 sont variées mais globalement caractérisées par une réponse immune inappropriée. Nous savons désormais que la suractivation de la réponse innée participe largement à la physiopathologie de la maladie. Nous savons aussi que les anticorps neutralisants protègent d’une infection par le SARS-CoV-2. Mais de récents travaux suggèrent qu’une dérégulation de la réponse-anticorps contribue à aggraver l’état clinique du patient. Certains auto-anticorps (AAb) sont pointés du doigt. Il s’agit d’anticorps déviants qui se retournent contre nos propres protéines et qui favoriseraient le développement de la Covid-19.

Pour affirmer cela, des chercheurs de l’Université de Yale se sont intéressés au rôle des AAb dirigés contre nos protéines circulantes dans la progression de la COVID-19. Ils ont mis au point un test haut-débit permettant d’évaluer la réactivité des anticorps d’un patient contre tout un ensemble de 2 770 protéines humaines et de certaines protéines de coronavirus (Rapid Extracellular Autoantibody Profiling, REAP). Ils ont appliqué ce test à une cohorte de 194 patients COVID-19 (dont 20 personnels soignants) et à 30 volontaires sains.

Globalement, les résultats montrent clairement que les patients COVID-19 ont plus d’AAb que les personnes saines, en particulier les cas sévères. Certains AAb existaient avant l’infection, d’autres ont été acquis juste après. La plupart de ces anticorps ciblent des protéines liées aux mécanismes immunitaires, modulant ainsi leurs activités : cytokines, chimiokines, facteurs de croissance, facteurs du complément ou protéines exprimées à la surface des cellules immunitaires. Les plus fréquents sont les anticorps ciblant les interférons de type I (anti-IFN-I, 5.2% des patients) et anti-IFN-λ2/λ3, qui aggravent la maladie.

Ces chercheurs ont confirmé in vitro que les prélèvements sanguins des patients bloquent l’action de l’IFN-I, GM-CSF, CXCL11 ou CXCL7 et que certains anti-CD8/CD3ε stimulent la phagocytose de cellules saines par les macrophages. Les patients avec des AAb anti-IFN-I ont des charges virales plus élevées, passent de plus longs séjours à l’hôpital, ce qui est caractéristique d’une difficulté à éliminer le virus. Les patients avec des AAb ciblant des protéines de surface (CD38, FCRL3, CCR2, CD3ε…) montrent un déclin des cellules B ou T correspondantes, ainsi qu’une chute des anticorps anti-RBD (le domaine de Spike interagissant avec le récepteur). Une seconde catégorie d’auto-anticorps cible des tissus variés (cellules vasculaires, plaquettes, peau…) et leur présence est corrélée à certaines caractéristiques cliniques comme les variations de l’expression de certains biomarqueurs de la sévérité COVID-19 (CRP, D-dimer, ferritine).

Sur un modèle de souris exprimant le récepteur ACE2 humain, ces chercheurs ont montré in vivo que l’administration préalable d’anticorps dirigés contre les récepteurs de l’IFN-⍺/β affaiblit l’animal et le fait maigrir une fois infecté par le SARS-CoV-2. En effet, on observe que les macrophages et les cellules T ne sont plus assez dirigés vers les poumons et ne murissent pas assez pour être efficaces. De la même manière, les souris ayant reçu des anti-IL-1β, IL-21, et GM-CSF maigrissent ou meurent davantage. Ces résultats montrent in vivo la pertinence des données REAP.

Cette étude suggère donc que la présence d’auto-anticorps, de cibles et taux variables chez les patients, participe largement à la physiopathologie COVID-19 en modulant la réponse immune et l’homéostasie tissulaire. Parmi les voies immunitaires affectées, certaines n’avaient jamais été décrites. Bien que ces données nécessitent d’être approfondies, elles soulignent un aspect sous-estimé de la COVID-19 et révèlent de nouvelles pistes thérapeutiques à explorer.

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