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Vulgarisation scientifique des avancées de la recherche sur la COVID-19

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Prédire l’avenir des vaccins grâce au langage humain

La capacité des virus à muter et à échapper au système immunitaire est un obstacle majeur pour le développement de vaccins universels mais aussi de certaines thérapies. Les mutations d’échappement peuvent changer « l’apparence » des protéines virales de surface, sans altérer leurs structures et leurs fonctions, et donc masquer le virus aux yeux du système immunitaire. Elles peuvent être simples (une mutation dans un domaine d’une protéine) ou multiples (sur plusieurs domaines). Mais est-il possible de prédire quelles mutations vont permettre un échappement viral ? Cela serait fort utile, mais le nombre élevé des possibilités est impossible à tester en laboratoire. Derrière ce sujet se cache une question très actuelle : combien de temps l’efficacité des vaccins anti-COVID-19 va-t-elle durer ?

Des chercheurs américains (MIT) ont développé un algorithme informatique pour prédire les domaines d’une protéine où vont survenir des mutations d’échappement à partir de sa séquence (succession particulière d’acides aminés formant la protéine). Ce modèle s’inspire du langage humain naturel (assistance et reconnaissance vocale…): des séquences de mots peuvent s’assembler différemment, suivant des règles précises (grammaire), pour donner des phrases ayant des sens différents (sémantique). Adapté à la virologie, des acides aminés (comme les mots) peuvent s’assembler différemment, suivant certaines règles (comme la grammaire) pour le maintien de la réplication virale et du caractère infectieux, le « fitness viral », pour donner des protéines qui échappent aux anticorps (comme des phrases). Ce modèle a été appliqué à 3 protéines virales de surface qui régissent l’attachement aux cellules et qui sont donc les cibles des anticorps neutralisants : l’hémagglutinine (HA) du virus Influenza A (grippe), la protéine d’enveloppe (Env) du VIH-1 (SIDA), et Spike (S) du SARS-CoV-2 (COVID- 19). Le modèle a été calibré à partir de plus de 100 000 souches différentes de ces virus. On a ajusté ou ajouté de nombreux paramètres (données structurales, pharmacologiques et immunologiques de la littérature) pour affiner le modèle.

Quels en sont les résultats ? Tout d’abord, cet algorithme linguistique surpasse les modèles virologiques en précision. De plus, seule la séquence de la protéine est nécessaire, bien plus simple à obtenir que sa structure 3D.

On a ainsi prédit d’abord que le fitness viral diminue lorsque le nombre de mutations augmente. C’est pertinent d’un point de vue biologique (plus de risques d’altérer des fonctions essentielles du virus), mais aussi linguistique (plus on change les mots d’une phrase, plus elle perd de son sens). Le modèle prédit correctement les zones des 3 protéines virales qui sont sujettes aux mutations d’échappement : le domaine « head » de HA, V1/V2 de Env, et RBD de Spike. Il prédit enfin correctement les zones conservées (jamais mutées car essentielles aux fonctions de la protéine), qui sont de bonnes cibles vaccinales ou thérapeutiques.

Ce modèle pourrait donc s’avérer efficace pour l’élaboration de vaccins. Il repose sur le fait que des mutations font évoluer des protéines sous une pression de sélection, ce qui sous-tend le principe de l’évolution lui-même, et pourrait donc s’appliquer à d’autres domaines biomédicaux, comme par exemple la résistance aux médicaments.

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